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Chroniques
Richard Wagner
Das Rheingold | L’or du Rhin
Das Rheingold est le prologue de la célèbre tétralogie de Wagner Der Ring des Nibelungen (L'Anneau du Nibelung), inspirée par les personnages mythologiques des légendes nordiques et allemandes. Les Filles du Rhin sont chargées de protéger l'or qui se trouve dans le lit du fleuve. Alberich, un Nibelung, surprend un secret des Ondines : qui, ayant accepté de renoncer à l'amour, forgera un anneau de cet or aura un pouvoir sans limite. Alberich n'hésite pas et s'empare du trésor. Ailleurs, d'autres tractations ont lieu. Les géants Fafner et Fasolt, ayant construit pour Wotan sa nouvelle demeure – le Walhalla –, viennent réclamer le prix de leur labeur : Freia, déesse de la Jeunesse et de la Beauté.
La première de cette production eut lieu le 12 mars 1999, à l'Opéra National de Stuttgart. Expérience plutôt rare, le théâtre confiait chacun des quatre opéras du Ring à un metteur en scène différent. Selon le souhait de Joachim Schlömer, les personnages évoluent dans un décor (de Jens Kilian) qui tient de la station thermale ou du sanatorium. Vasque d'eau au centre de la scène, coursive en surplomb, ascenseur pour aller de l'une à l'autre créent une ambiance réaliste qui fonctionne tout à fait. L'espace scénique est hermétique, permettant les différents déchirements qui vont avoir lieu – la violence liée ici à la possession de l'or n'étant qu'un avant-goût de toute celle qui parcourt le cycle, hommes et dieux confondus. Cette tragédie au quotidien est rendue par un film excellent, ayant sa vie propre : les plans changent en fonction de l'action et le rythme suit les moments forts.
Du côté des artistes en scène, s'il y a adéquation comme rarement entre le physique, la voix du chanteur et le caractère du personnage qu'il incarne, l'enchantement n'est pas total : Wolfgang Probst (Wotan) donne la réplique à Michaela Schuster (Fricka) avec un vibrato usé ; après un début peu convaincant, la voix de Motti Kaston (Donner) surpasse aisément celle de Bernhard Schneider (Froh). Esa Ruuttunen (Alberich, « le drôle de lascif ») est un peu fatigué, lui aussi.
En revanche, L'unité vocale est parfaite entre les Filles du Rhin – signalons l'excellente Flosshilde de Margarete Joswig. Les Géants sont choisis : Roland Bracht (Fasolt) a de la puissance et Philipp Ens (Fafner) possède une voix corsée et sonore, bien placée, avec de beaux graves qui sonnent. Robert Künzli (Loge précis et vaillant) réalise des attaques pianissimo d'une tendresse rare. Enfin, Mette Ejsing (Erda), par un vibrato très large, remplit parfaitement son rôle de prophétesse, annonçant le Crépuscule des Dieux dans une pénombre soudaine, animée de lampes clignotant, de rideaux au vent et de détritus de plastique.
Malgré des cuivres imprécis, la direction intense et vive de Lothar Zagrosek – à la tête du Staatsorchester Stuttgart – est largement convaincante. Un début prometteur à cette initiative, mais qui va nous rendre exigeant pour la suite !
LB